L’usine à neige est ce gros bâtiment, situé à l’arrivée du télésiège des « Menuires » ; on ne peut pas le rater, il est face à nous quand on débarque du télésiège. J’avoue que je passe souvent devant mais que je n’avais jamais imaginé que ce bâtiment abritait le centre névralgique de toute la fabrication de la neige des Menuires et de Saint Martin !

L'usine à neige

La toute première usine entièrement automatisée

- L’usine à neige des Menuires existe depuis 1986 ; elle était alors la toute première usine complètement automatisée. « Complètement automatisée », cela signifie qu’un ordinateur pilote les enneigeurs improprement appelés canons à neige) et un automate pilote le fonctionnement de toutes les machines de l’usine. Et 2 personnes, Yves Bonnefoy et Bernard Guigonnet, gèrent l’usine, c'est-à-dire décident des priorités d’enneigement et pilotent le fonctionnement de l’ordinateur et de toutes les machines. Si un problème est décelé alors qu’ils ne sont pas présents, ils sont « bipés » directement par l’ordinateur et doivent alors monter réparer le dysfonctionnement.

L'ordinateur pilote en temps réel tout le réseau d'enneigeurs

Pourquoi parle t on d’une « usine » à neige ?

- Parce que c’est une véritable unité de production de neige : l’usine à neige abrite en effet tous les différents éléments nécessaires à la production de neige : des compresseurs d'air et une centrale de traitement d'air, du matériel de contrôle et de régulation nécessaire au bon fonctionnement de l'installation, un ordinateur central avec un disque dur conséquent et un logiciel spécifique pour piloter tous les enneigeurs, des armoires électriques et des automatismes, des grosses pompes qui alimentent en eau les enneigeurs…

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Les pompes récupèrent l'eau du lac et l'envoient dans les tuyaux verts))Les compresseurs d'air envoient de l'air comprimé dans les tuyaux bleusLes pompes récupèrent l'eau du lac et l'envoient dans les tuyaux verts et les compresseurs d'air envoient de l'air comprimé dans les tuyaux bleus.


Quelle est la différence entre la neige artificielle et la vraie neige ?

- Tout d’abord il est important de ne pas parler de neige « artificielle » mais de neige de culture car c’est bien de la neige qui est produite par les enneigeurs ; les composants sont les mêmes, sans adjonction d’aucun autre produit « chimique » de type snowmax (protéine utilisée par certaines stations).
La recette de la neige est relativement simple : des gouttelettes d’eau propulsées dans de l’air ! Mais les gouttelettes doivent être très fines (0,2 à 0,8 mm de diamètre) et l’air doit être très froid pour que la projection se transforme en grains congelés qui vont formés de la neige quand ils retombent au sol. La neige « naturelle », elle, provient de la vapeur d’eau contenue dans les nuages.

D’où provient l’eau propulsée dans les enneigeurs ?

- L’eau est puisée dans les 2 retenues d’altitude « «Echaux 1 » et « Echaux 2 », situées le long du Téléski de Montaulever. Echaux 1 est à l’origine un lac naturel qui a été aménagé ; Echaux 2 est une retenue artificielle, créée un peu au dessus de Echaux 1, remplie à partir du réservoir de Reberty (l’eau provient en partie de la station de pompage située sur la route de Val Thorens, c’est l’eau du Lac du Lou !).
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Le Lac Echaux 1, juste au dessous de Echaux 2))Le Lac Echaux 2
Echaux 1 et Echaux 2

- Les 2 retenues contiennent chacune 50 000m3 d’eau, soit 100.000 m3 au total. Une troisième retenue d’eau sera mise en service bientôt, celle des Teppes Noires (au dessus du départ du TS des Granges) ; elle desservira les pistes de St Martin. Pour l’instant l’eau de St Martin est puisée dans la rivière puis testée avant d’être propulsée dans les enneigeurs.


- Au fond des retenues, une canalisation permet de refroidir l’eau (c’est le bullage, qui est l’infection d’air dans ce tuyau au fond du lac), ce qui explique pourquoi on voit des bulles à la surface ; mais il ne faut pas non plus que l'eau gèle en surface (le brassage évite que l'eau ne gèle).

Le Lac Echaux 2 : on aperçoit des bulles en surface
Le Lac Echaux 2 : on aperçoit des bulles en surface



- Cette eau descend jusqu’à l’usine à neige d’où elle est propulsée dans les dizaines de kilomètres de canalisations (maximum 1200 m3/h). Mais il faut aussi propulser de l’air, par d’autres canalisations. La couleur permet de distinguer les canalisations : conduite verte pour l’eau et conduite bleue pour l’air.

- Bien sur, on est complètement dépendant des ressources d’eau : si l’eau vient à manquer (comme en début de saison), on ne produit pas de neige de culture, on attend que l'eau se renouvèle (précipitations).

Et pour l’air, ça se passe comment ?

- L’air est « fabriqué » par des énormes compresseurs situés dans l’usine : l’usine contient plusieurs compresseurs (à vis), qui servent à fabriquer et envoyer de l’air dans les conduites « bleues ». Contrairement à l’eau, dont la pression varie beaucoup dans les conduites, l’air a une pression plutôt constante dans les canalisations, de l’ordre de 8 à 8,5 bars.

- Ces compresseurs chauffent, de l’eau est utilisée pour les refroidir afin que l’air propulsé dans les canons ne soit pas chaud. Et cette eau utilisée pour le refroidissement (c’est donc de l’eau devenue chaude) est remontée (canalisations « jaunes ») dans un ruisseau près de la piste des « 4 vents » pour ensuite être déversée dans le lac des Echaux, ce qui l’empêche de geler! A noter aussi qu’un appareil (le Bekospit) permet de traiter les déchets d’eau et d’huile liés aux compresseurs.

Pour résumer, dans l’usine à neige, s’entrecroisent des conduites d’eau à destination des enneigeurs (conduites vertes), des conduites d’air comprimé, en sortie des compresseurs (conduites bleues) et des conduites d’eau chaude (conduites jaunes) qui remontent au lac.

Combien y a-t-il d'enneigeurs sur les Menuires et St Martin?

- 396 enneigeurs sont reliés à l’usine à neige et peuvent être commandés indépendamment ; chacun est donc alimenté par une conduite d’eau et une conduite d’air ; il est piloté par l’intermédiaire d’un modem situé à l’intérieur de la vanne, commandé par liaison téléphonique. Le « mélange » se fait directement dans l’enneigeur, juste avant l’expulsion.
Mais si la pression de l’air est relativement constante, la pression d’eau va varier énormément selon la position de l'enneigeur. Pour ceux qui sont situés en altitude la pression devra être boostée (par des unités « booster » le long de la ligne). Par contre, pour ceux qui sont situés plus bas que l’usine, la pression de l’eau sera naturellement plus élevée et il faudra plutôt chercher à la diminuer. Configuration des sondes et des enneigeurs sur Les Menuires et St Martin

Il y a différentes sortes de canons sur les pistes non ?


- Oui il y a 2 types d’enneigeurs, « haute pression » (bi-fluide) ou « basse pression » (mono-fluide). On a plusieurs modèles différents aux Menuires. Les plus récents sont moins bruyants mais nécessitent une plus forte pression d'eau et ils consomment 10 fois moins d'air que les anciens. Le débit d’eau peut aller de 3 à 7 m3/h pour les anciens, de 15 à 45m3/h en fonction des températures extérieures pour ceux de nouvelle génération. Leurs performances permettent d’augmenter le nombre d’appareils susceptibles de fonctionner en simultané, permettant une augmentation de la capacité de production.



- Non loin des canons, on trouve une centaine de sondes électroniques (espèces de grands « perchoirs » blancs) disséminées sur tout le domaine ainsi que 8 anémomètres-girouettes ; les sondes captes et transmettent les paramètres nécessaires à l’ordinateur de l’usine .Elles renseignent notamment sur les conditions de températures (température sèche) et d’hygrométrie (humidité relative).
Les anémomètres-girouettes renseignent, eux, sur la force et la direction du vent. Les conducteurs des dameuses fournissent aussi des renseignements très précieux sur l’état des pistes, l’épaisseur et la qualité de la neige. Ces derniers sont aussi chargés de vérifier le bon fonctionnement des enneigeurs (de la glace peut se former s'il y a beaucoup de vent de face).
Tous ces paramètres alimentent l’ordinateur de l’usine à neige et lui permettent de piloter les enneigeurs. Les nivoculteurs fixent une température de démarrage et une température d’arrêt des enneigeurs.

- Notons que l’on peut fabriquer de la neige à partir d’une température humide de -1 °C. Aux Menuires l’air est plutôt sec, et généralement l’humidité relative est d’environ de 30 %. Cela permet de fabriquer de la neige à une température (sèche) de +3 °C.

photos de 3 différents canons
Canon sur le stadeCanon au sommet du Mt de la ChambreCanon à l'intermédiaire du TC des Bruyères

Cette neige de culture a-t-elle un impact sur l’environnement ?

- Toute l’eau puisée dans la nature retourne à la nature ; l’eau pulvérisée aux Menuires passe par les réservoirs d'eau potable, donc elle est « consommable » (propre) ; il n’y a pas d’impact sur la végétation car la fonte de la neige de culture est comparable à l’eau de pluie.

- Il y a certes un impact mais c’est celui de la consommation d’énergie et de la pollution « visuelle » ou sonore des enneigeurs. Mais tous les nouveaux équipements cherchent à économiser l’énergie et préserver l’environnement visuel et sonore ; on cherche ainsi à remplacer les anciens enneigeurs assez bruyants par des plus silencieux aux abords des habitations. L’impact n’est certes forcément pas neutre mais à l’heure actuelle où les clients sont si exigeants, on n’imagine plus se passer de cette neige là!.

- Il est important aussi de noter que la neige de culture a eu une très mauvaise réputation en terme de « respect de l’environnement », image donnée par quelques stations qui ont utilisé certains produits (tensio actifs ou le fameux Snowmax). Mais aux Menuires nous sommes très soucieux et respectueux de notre environnement et n’utilisons aucun produit additif, par principe de précaution.

Conclusion : le réseau de neige de culture va certainement continuer de s’étoffer puisqu’il permet à la station de garantir, dès l’ouverture, un enneigement de qualité. Mais comme pour les remontées mécaniques, espérons que les évolutions techniques permettront de diminuer les nombres d'enneigeurs ou pourquoi pas les rendre « invisibles »....



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Annexes Quelques données chiffrées

Nombre Total d’enneigeurs : 396 dont 41 sur Saint Martin

Sondes électroniques : 113 dont 17 sur Saint Martin

Km de réseau sous terrain : 35 km

Surfaces couvertes : 160 hectares

Puissance déployée : 6400 kw/h

Potentiel maximum de transformation : 1200 m3 /h

Cout de fabrication d’ 1 m3 de neige : O,83 euros

1m3 d’eau produit 2m3 de neige



Pour couvrir 1 hectareil faut 3500 m3 d’eau et 26200 kw/h

Volume d’eau consommée depuis le début de la saison : 480 000 m3 pour 1500 h de fonctionnement